Il y a deux étapes, la première je préfère l’oublier car j’étais effacée. Que ce soit en France ou en Algérie, ça ne change rien puisque j’étais à la maison, je ne sortais pas. La deuxième était pleine de difficultés avec des enfants en bas-âge, sans aucun revenu et avec la peur de perdre ses enfants. Les premières personnes à m’aider, c'étaient les voisins, ils se sont tous mobilisés. L’un d’eux donnait un matelas, l’autre la vaisselle, etc., puisque mon ex-mari avait tout pris.
Et ensuite mon assistante sociale, car elle a fait son travail, et même plus parce qu’elle m’a cru. Mais la personne qui m’a le plus aidée, c’était Madame Yvette, qui m’a ouvert la porte.
Elle était bénévole à CARITAS. Une fois, j’y suis allée, je n’avais ni revenus ni allocations familiales. Mon assistante sociale m’a envoyé là-bas pour le panier d’aide alimentaire. Je me rappelle que c’était la rentrée et je n’avais même pas d’argent pour acheter un cartable à mon fils, je suis tombée en larmes et Yvette est venue à moi, je lui raconté mon histoire, mon histoire l’a touchée et elle m’a adoptée. J’avoue que ce n’était pas facile. Je ne connaissais aucune loi, j’avais des enfants en bas-âge. C’est elle qui m’a tout expliqué, le système, le fonctionnement, vraiment tout !
Ensuite, j’ai commencé à sortir, à travailler et tout ça avec la peur au ventre, peur de perdre mes enfants puisque j’étais poursuivie par mon ex-mari. J’ai été convoquée au commissariat, j’ai été reçue comme une criminelle, je suis tombée sur un policier vraiment désagréable !
J’ai donc gardé cette peur, je voulais que mes enfants soient bien. Je voulais m’émanciper et travailler et ne pas rester en France pour profiter des aides comme le disait mon ex-mari. Je ne suis pas venue ici par choix, on m’a forcée à venir
Je me suis retrouvée seule avec mes enfants, et avec mon ex-mari qui percevait encore les allocations. Du coup, je suis allée à la CAF et j’ai tout raconté, mais comme on dit “la loi ne protège pas les imbéciles”. J’ai tout dit, mais tout a été retourné contre moi, on m’a dit que les APL sont attribuées à “M. et Mme”, donc j’ai du rembourser le trop perçu. Je me suis retrouvée avec une dette de 8000€. J’ai essayé d’écrire des lettres mais rien n’a fonctionné et j’ai tout remboursé.
Pour mon premier travail, je touchais donc l’allocation pour femme isolée et j’ai été invitée par la CAF, c’était une opportunité pour toute personne en situation monoparentale, pour les aider à travailler. J’y suis allée, et on m’a fait passer des tests d’écrit et d’oral que j’ai réussi. Ensuite on m’a dirigée vers une association pour les femmes ou toute personne qui veut revenir à la vie active. J’ai aussi fait des formations pour des remises à niveau en Français. Il fallait vraiment que je fasse ces remises à niveau car je connaissais le système en Algérie, mais pas ici. J’encourage toutes les femmes à se diriger vers une association de réinsertion, parce que j’ai pu choisir, dire je peux faire ça, je veux faire ça. J’ai pu utiliser mon savoir, mes expériences en Algérie par exemple.
Yvette m’a tout montré, le système, la culture, la vie. Je fêtais Noël avec elle, elle se déguisait en Père Noël, mes enfants y croyaient, ils étaient naïfs. Elle m’a épaulée, elle m’a coachée, maintenant on utilise ce terme, eh bien elle m’a coachée ! Je ne faisais rien sans elle, je faisais tout avec elle. Maintenant, on se voit de temps en temps pour ne pas couper les liens, pour avoir des nouvelles, elle me considère comme une membre de sa famille.
l y a aussi mon avocate. C’est grâce à elle que j’ai réussi. Je travaillais chez un couple, et en discutant avec son mari, je lui ai raconté mon histoire, il m’a dit que sa femme est avocate. Je lui ai dit que je ne faisais plus confiance à mon ancienne avocate et lui ai demandé, “est-ce que vous pouvez prendre sa place ?”. C’est grâce à elle que j’ai réussi à être zen et avoir la conscience tranquille, sans penser qu’il viendra un jour me prendre les enfants. En fait il n’y a aucune loi qui dit que les enfants m’appartiennent ou qu’ils lui appartiennent. Ensuite, il y a eu le jugement qui a décidé que les enfants restent chez la maman mais que le papa peut venir les voir quand il veut.
Et c’est à ce moment que j’ai rencontré Faïza. Un week-end sur deux, j’avais mon week-end où je sortais, je profitais et donc j’ai rencontré Faïza sur un site de sorties. On a plein de choses en commun, on est du même coin, la même situation, on a le même âge, nos enfants ont à peu près le même âge aussi et ils partaient en week-end chez le papa le même week-end. Elle est devenue ma coach du côté coeur, intime, personnel. Parce que même au niveau des fréquentations, j’étais encore dans un schéma de soumission, si elle n’était pas là j’aurais fait la même erreur que la première, avec mon ex-mari.